Entre farce bête et méchante et traité d'esthétique sur la beauté du Mal, The House that Jack built étonne autant qu'il déconcerte. Lars von Trier opère le grand écart entre un récit cartoonesque au sadisme complaisant et un essai théorique pas inintéressant pour peu qu'on passe outre les analogies douteuses.
Le cinéaste se sert de la figure du serial killer comme le support de sa propre pratique artistique, totalement fascinée par le Mal, en ce qu'il manifeste une libération totale de tous les dogmes (tiens, tiens) moraux, esthétiques, sociaux...Figure scandaleuse révélant l'hypocrisie du jeu social et l'indifférence d'un monde individualiste, le tueur se fait le double de l'artiste en démiurge tout-puissant, frappé d'ostracisme par son effrayant génie que personne ne comprend.
Finalement, après Antichrist et sa métaphysique démoniaque, Lars von Trier conçoit The House that Jack built comme son art poétique, un ultime manifeste pour un art immoral (ou plutôt contre la morale dominante) et qui se complait dans la transgression puérile de tous les tabous. Le film n'est clairement pas aimable, mais son nihilisme ricanant porté par un Matt Dillon entre bouffonnerie et effroi tranche singulièrement dans une année cinéma plutôt tiédasse.